
Rien n’est jamais clos (extrait)
Il y a dans certains silences une tension que seul le passé sait imposer.
Aujourd’hui, je vous partage un extrait de mon roman en cours, “Deux Cent Quatorze”. Ce passage agit comme une respiration suspendue, un moment entre-deux. Un interlude dans lequel le doute, le poids des souvenirs et la lente avancée du temps prennent toute la place.
Merci d’être ici pour lire, ressentir, suivre cette aventure mot après mot.
(Extrait de mon roman « Deux Cent Quatorze »)
Le passé a sa propre manière de s’inviter.
Il y a des choses qu’on croit oubliées. Des ombres que l’on croit laissées derrière soi, des histoires qu’on pense avoir refermées. Mais elles reviennent toujours. Parfois sous la forme d’un souvenir fugace. Parfois sous la forme d’un simple appel.
Le passé a sa propre manière de s’inviter, et il ne demande jamais la permission.
Un bureau. Ordonné, impeccable. Une lumière tamisée filtre à travers les stores. Le silence. Juste le tic-tac régulier d’une horloge. Une silhouette immobile. Droite. Le regard fixe.
Sur le bureau, un dossier, parmi d’autres. Un simple dossier, beige, sans fioritures. Rien qui attire l’attention, et pourtant… Un souffle. Infime. Un mouvement hésitant. Des doigts qui s’approchent du bord du document, effleurent la couverture sans l’ouvrir.
L’air est étrangement lourd, comme si quelque chose pesait sur cette pièce pourtant vide. L’ombre d’un doute, ou d’une certitude.
Finalement, la main se retire. Lentement. Le dossier reste fermé. Pour l’instant.
Le bruit d’un siège qui grince. Une inspiration retenue. La silhouette ne bouge pas tout de suite. Les doigts s’attardent sur le bois du bureau, tapotent doucement, comme si un choix devait être fait, comme si chaque seconde pesait lourdement sur la décision à venir.
Dehors, la ville continue de vivre, indifférente. Des bruits étouffés de circulation filtrent à travers la fenêtre à peine entrouverte. Un moteur qui ronronne. Des voix lointaines, indistinctes.
Un portable vibre brièvement sur le bureau. L’écran s’allume, projetant une lumière blanche qui découpe un instant l’obscurité. Un message. Le regard se baisse. Un léger froncement de sourcils. Puis, lentement, la main s’approche du téléphone. Un murmure presque imperceptible fend l’air. Un soupir, ou un mot à peine prononcé. Le téléphone est saisi, mais pas ouvert immédiatement.
Le dossier, lui, est toujours là. Fermé. En attente. Le passé peut attendre encore un peu. Mais pas longtemps…

